Afin de percer les secrets du corps humain, le maître de la Renaissance a disséqué une vingtaine de cadavres : 87 de ses dessins sont présentés à Londres dans une exposition sans précédent.
Dans les années 1490 à Milan, Léonard de Vinci a schématisé le cerveau, figurant trois ventricules où se logent les quatre fonctions de l’intellect : la sensation, la mise en images, le jugement, la mémoire. Une organisation parfaite, à l’instar d’un monde créé par Dieu. Sur le même tracé où figure cette fantaisie sacrifiant aux croyances de son temps, le dessinateur séparait avec davantage de pertinence l’enveloppe du cerveau jusqu’à la pie-mère, membrane pourtant difficile à discerner à l’œil nu.
D’un côté, la foi d’une époque, imbibée de mythologie religieuse, toujours imprégnée des textes savants de l’Antiquité et des manuels qui continuaient d’en faire l’exégèse, sources que l’artiste consultait dans les bibliothèques des hôpitaux. De l’autre, le scalpel de son observation clinique. Entre les deux s’insère le crayon d’un des plus brillants dessinateurs de tous les temps.
Léonard a beaucoup pratiqué la dissection d’animaux, mais aussi d’hommes, dont il voulait tirer un traité d’anatomie. Il n’était pas seulement le génie artistique dont la réputation a gagné l’Europe de son vivant. Grâce aux milliers de pages qu’il a griffonnées, nous avons également idée de ses dons d’architecte et d’ingénieur, imaginant, avec plus ou moins de bonheur, un pont sur le Bosphore, un sous-marin, un char d’assaut ou un hélicoptère. De ses talents de musicien, qui avaient aidé à son introduction à la cour de Milan, pratiquement rien ne nous est parvenu. Quant à cette confrontation avec la biologie, elle est restée méconnue.